UN ZOO À ETRETAT

Incroyable mais vrai, le Zoo d'Etretat, voisin du Donjon, ouvre ses portes un beau jour de Mai 1961, sous l'égide de Mr André et Mme Monique Bercovitz et leurs filles.

Avec en toile de fond, la mer et l'aiguille d'Etretat, singes, émeus, daims de Sibérie, lamas du Pérou, kangourou, chèvres du Sénégal, et bien d'autres, venu des quatres coins du monde, ont cohabité pour devenir sans conteste la plus spectaculaire des attractions d'Etretat.

Un zoo à Etretat

C’est l’histoire de notre voisin le plus proche, juste au-dessus de notre domaine, celui dont on aperçoit encore le toit d’une maison qui a été un bien joli théâtre. Mais c’est avant tout une histoire d’amour pour une petite blondinette qui n’était qu’alors tout bébé. André Bercovitz, entrepreneur dans l’âme n’en est pas à son coup d’essai dans les entreprises folles et décalées. Mais ce défi était de la taille d’aucun autre. Comment amuser et divertir sa fille comme personne ne l’avait fait encore ?

Mieux qu’en peluche ou en plastique, des joujoux (comme il le disait) vivants et inimitables, ont été la clé pour satisfaire cette petite fille, mais aussi cet homme insatiable de projets fous et passionné des bêtes.

André Bercovitz, parisien et administrateur de biens, s’installe avec sa femme Monique (la complice de cette belle histoire racontée ici) en 1959, à la « Villa Moniandre », sur la route de Fécamp, à l’entrée d’Etretat, presque en face à l’époque de « La Ramée », résidence du président René COTY, et voisine de « L’Orphée », résidence secondaire d’Offenbach.

C’est ainsi que la charmante station balnéaire, vers laquelle convergent tant et tant de touristes et visiteurs pour ce qu’elle offre de pittoresque et de beauté, ajoute à ses multiples attraits, un beau jour de Mai 1961, celui d’un parc zoologique aménagé pour le grand public dans un domaine non moins remarquablement choisi.

Membre de la société protectrice des animaux, son objectif principal, outre choyer sa petite fille, était de faire comprendre au public tout ce qu’ont d’attachant les animaux, ces êtres qu’on nous dit inférieurs et qui, à plus d’un titre cependant peuvent donner aux humains quelques leçons.

C’est avec cette passion, cette volonté et cet amour, qu’après des mois de rénovations, dans les trois hectares de parc ombragés qu’il possède autour de sa résidence étretataise de l’avenue Offenbach, qu’André Bercovitz ouvre sa propriété aux visiteurs désireux de découvrir sa riche collection d’animaux en liberté sous les pins et autres essences d’arbres constituant avec un plan d’eau, un cadre idéal pour tous.

Ce sont 150 animaux en liberté presque totale, perchés sur les hauteurs d’Etretat qui sont présentés à pas moins de 800 personnes qui se sont pressées à l’ouverture de ce parc improbable. « Un véritable enrichissement du patrimoine touristique de la région cauchoise », selon M. André Bettencourt, député de l’époque, qui a présidé l’inauguration officielle du Parc aux Bêtes pendant les fêtes de pâques 1961.

« Ce que j’ai désiré avant tout, précise dans les médias, M Bercovitz, c’est rendre possible le contact entre le public et les animaux. Ceux-ci restent donc en liberté. Seul «  Souky » le merle mainte des Indes, et deux ours bruns d’Abyssinie sont maintenu en captivité. De toute façon, là où les clôtures sont nécessaires, nous les avons voulues discrètes et aménagées de telle sorte que l’impression de liberté subsiste ».

Il faut le voir pour y croire

Le visiteur ne se lasse pas de regarder vivre ce petit monde au hasard des allées sous les pins, avec en toile de fond la splendide vue sur la mer et l’aiguille d’Etretat.

On entre par une petite porte ouverte sur l’avenue et, après avoir franchi des marches et parcouru une allée montante, bordée de massifs de fleurs et d’arbustes, on est accueilli par les premier pensionnaires de ces lieux : 24 singes (mandrilles et Hamadrias), qui s’ébattent librement dans une immense cage, qui s’épucent et se gratouillent réciproquement. Puis en montant encore un peu plus où le fin gravier crisse sous les pieds, on accède enfin au domaine, après une terrasse où tables et parasols accueillent les visiteurs pour le thé, où se côtoient tout ce joli monde peuplé de silhouettes humaines et animales.

Quatre Emeus, oiseaux coureurs d’Australie, douze chèvres naines du Sénégal, un mouflon des Andes (spécimen rarissime), quatre daims de Sibérie, des singes (20 mandrills et cynocéphales), un couple de kangourou, des perroquets, des lamas du Pérou, des flamants roses, des hérons pourprés du Mozambique, des aigrettes blanches d’Afrique du Nord, des oiseaux trompettes d’Australie, une guenon, des faisans dorés, des paons, grues antigone, daims et cerfs…

Tout un écosystème venu des quatre coins du monde qu’il a fallu acclimater au climat cauchois pendant plus d’un an, pour gérer en particulier les écarts de température qui leur sont devenus indifférents. 

Deux soigneurs sont chargés de veiller sur leur santé et de leur distribuer leur nourriture quotidienne. Nourriture quotidienne (presque 100kilos/jour) qu’il fallait tant bien que mal se procurer, nous confie Monique Bercovitz au travers d’un drôle de souvenir encré dans sa mémoire presque 60 ans plus tard. « Parfois le matin le poissonnier nous appelait pour récupérer les invendus et les restes, et je descendais en ville avec mon petit camion, parée de fourrure et bijoux, pour remplir le coffre de têtes de poissons, arrêtes et autres restes de poissons … »

Le chimpanzé avait par exemple ses humeurs. Délicat à table, il fallait éviter de lui servir deux fois de suite le même repas à raison de 3 repas par jour en changeant au moins la viande. « Par chance il s’est tellement adapté qu’il avait une préférence pour des aliments relativement simples, comme la crème de gruyère, les pâtes et le riz (mais cuit à point) ». Mais le casse-tête est général. Pour nourrir tout ce petit monde, chaque jour il fallait à titre d’exemple, trouver 5 kilos de poisson frais pour les pélicans, et 5 autres kilos pour les pingouins qui eux refusaient et dédaignaient tout poisson amputé de la tête ou de la queue.

Le nouveau parc d’Etretat enrichit le patrimoine cauchois

L’année suivant son ouverture en 1963, c’est toujours le même effervescence. Outre les résidents ou estivants étretatais, les Havrais et les Cauchois viennent en nombre. Bien que de création récente, le parc aux Bêtes semble avoir toujours existé tant il s’est mêlé à le vie d’Etretat. La marque même d’une entreprise réussie. Cette propriété désormais de 11 hectares, compte un peu plus de 200 pensionnaires, « à vrai dire avec les naissances, on ne savait plus exactement », sourit Monique.

En effet, en quelques temps le parc se repeuple de lui-même. Trois ans après son ouverture, onze chevreaux du Sénégal ont vu le jour, un pingouin manchot s’est mis à couver, mais aussi, fait exceptionnel à cette époque et sous ce climat un peu rude pour certains, un petit singe est né.

Sans conteste la plus spectaculaire attraction, devancée par les falaises bien-sûr, offerte aux touristes foulant Etretat, le soin apporté dans ses aménagements par André Bercovitz, a été récompensé par 60 800 visiteurs, 20% de plus qu’en 1962 lors de son ouverture. Si le zoo d’Etretat intéresse tous les publics, on sait qu’il s’adresse particulièrement aux enfants, et c’est à l’intention de ceux-qui qu’André Bercovitz a muri très vite le projet de « Poney-club ». Sur ses nouveaux terrains fraîchement acquis, c’est dans une prairie de 4 hectares qu’il y installe des poneys d’Andalousie, des Shetlands et des ânes miniatures, tous en semi-liberté, pour que les jeunes apprentis cowboys et cavaliers en profite comme dans un immense terrain de jeu, toute la journée.

Puis cette verte prairie, bordée de blanches palissades et de rosiers, s’est rapidement transformée et développée en une nouvelle extravagance, qui deviendra la nouvelle attraction d’Etretat da l’année 65 : Un Club hippique.

« La saison n’est pas encore commencée et nous avons déjà plus de cent inscriptions. Je n’avais prévu que quatorze chevaux, mais je vais être contraint de porter leur nombre à une vingtaine », confie à l’époque l’entrepreneur et président du club aux journalistes. Phénomène rare à l’époque et peut-être même un peu trop tût, ce sont en fait les femmes et les jeunes filles, très friandes du lieu et de fait de ce sport, qui font émerger le club dont on parle sur toute la côte d’Albâtre.

Voilà un succès dont la promptitude ne fera pas les affaires de tout le monde. Tandis qu’il se poursuit, l’équipement du club se développe avec un parc couvert pour chevaux et cavaliers, une piste d’un kilomètre de long sur un terrain richement gazonné de 5 hectares, un vaste manège, un club-house avec une grande sellerie, un bar et enfin, en marge, un terrain de jeux surveillé pour les enfants avec beaucoup de sable, balançoires, manège, toboggans. De plus une dizaine de bungalows disséminés dans la prairie servent de relais équestres pour les cavaliers en promenade le weekend.

Autant d’aménagements pour un objectif secret : organiser un concours hippique national à Etretat.

Brillant succès inespéré en ce 22 août 1965

Les organisateurs du Concours Hippique étaient fort inquiets quand au maintien de cette manifestation encore la veille au soir. Les trombes d’eau déversées la veille, rendaient le déroulement de cette compétition fort aléatoire. Mais comme pour faire mentir les pessimistes, la journée de ce dimanche 22 août 1965, fut convenablement ensoleillé, et le terrain qui était quelque peu glissant le matin même, apparut excellent par la suite.

Pour la première fois de son histoire, le concours s’est déroulé au Parc Aux Bêtes du dynamique couple M et Mme Bercovitz, avec la collaboration des organisateurs de la société Hippique de Fécamp. Très appréciés des connaisseurs, les concours hippiques le sont beaucoup moins de la grande foule. Cette fois-ci pourtant, les Etretatais vinrent très nombreux. En tout 193 chevaux, venant pour la plupart de Deauville, Dieppe, Fécamp, St-Saëns, Tôtes et de la région parisienne, ont participé aux quatre épreuves du concours. Epreuves et obstacles jugés sévères par l’ensemble des participants et concurrents d’ailleurs. Les difficultés de parcours, ainsi que les règlements ont dénoté ainsi un souci de diversité. Mais si la sévérité des obstacles permit à plusieurs cavaliers de brillamment se distinguer, l’ensemble des concurrents, d’un bon niveau régional, eut à en souffrir.

Toutes les belles choses ont une fin

Le temps, l’investissement et l’argent… ce trio malheureusement très énergivore a mis fin à cette belle histoire. Non sans regret, nous préférons garder le sourire aux lèvres de Monique lorsqu’elle se rappelle de ces jours heureux, avec mari et enfants, entre singes et lamas sur les hauteurs d’Etretat.


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